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Sur la route du blues

A l'origine il y a un reportage visionné il y a quelques années:

"Le city of New Orleans"

C'est le nom d'un train mythique américain, popularisé par la chanson éponyme de Steve Goodman en 1971, qui rallie la Nouvelle Orléans à Chicago le long de la route du blues. Après l'abolition, les esclaves affranchis fuient la misère et la ségrégation des terres du sud pour rejoindre les grandes villes du nord semant sur leur route la culture du blues et du jazz.

Séduite par cette quête initiatique et par ce train célèbre, c'est cette route que nous suivrons dans le sens nord-sud.

Point de départ: Chicago

Que dire? Un vrai coup de cœur pour la cité des vents, nommée ainsi moins pour sa météo que pour la prolixité de leurs politiciens, à méditer...

Tout et son contraire se mélangent harmonieusement dans cette mégalopole, troisième ville des États-Unis où l'on se tord le coup pour admirer les grattes ciel du Loop et se perd dans l'horizontalité à perte de vue des quartiers résidentiels de la périphérie. Où les buildings de verre et de béton rivalisant de hauteurs font face aux bâtiments art-nouveau de l'époque de la prohibition. Où les rues à angles droits d'une rigueur frôlant la maniaquerie débordent de parterres fleuris et luxuriants. Où les sculptures ultra-contemporaines font échos aux fresques murales populaires. Le tout bordé par le lac Michigan et traversé par la Chicago river. Bref vous l'aurez compris, une terre de contraste où tout s'équilibre à merveille pour créer une ambiance incomparable, une douceur de vivre à 100 à l'heure.

Remontons cette route du blues direction Memphis. Située dans le Tenessee, Memphis est la ville du sun studio, de l'usine Gibson et du King, entre autre. Résolument tournée vers la musique cette ville fait la part belle à son grand attrait touristique: le blues. Et en effet, descendre beale street à la nuit tombée au son des concerts, illuminé par les enseignes aux lettres de néons aux noms évocateurs tels que BB King's club, a une saveur incomparable. On s'arrête un moment pour écouter "Sweet home Alabama", on boit une big ass beer en discutant avec son voisin en s'égosillant pour couvrir le son de l'orchestre juste devant soit et on savoure cet instant, pleinement conscient d'être au cœur de ce rêve de route du blues maintenant devenu bien réel. On remonte beale street pour en reprendre une bonne dose et puis... et puis on rentre, parce qu'en toute honnêteté, sorti de beale street, Memphis, c'est mort.

Le lendemain, on prend la navette pour Graceland, royaume du kitch s'il en est, préparez-vous à l'overdose. Et attention, au royaume du mauvais goût, les fans du King sont rois. Nous voilà embarqués les uns derrière les autres dans une succession de files d'attente interminables et redondantes, leit-motiv de la journée, où tout se mérite à grand coup de dollars et de patience.

On visite la demeure d'Elvis restée figée dans ce qui se faisait de mieux en matière de déco, à faire passer Valérie Damidot pour l’ambassadrice du minimalisme. Sa salle des trophées, sa salle des télés, sa salle des costumes, ses voitures, ses avions et sa fin tragique... enfin pour ses fans, pas pour le merchandising qui n'a jamais aussi bien marché. Et quand à deux doigts de défaillir on quitte les lieux rassasié pour la décennie à venir du roi de Memphis, ce n'est pas sans chantonner "That's all right mama", gravé dans son cerveau telle une musique de pub qui ne nous quittera pas avant des heures voire plus pour peu qu'un petit malin la fredonne à son tour et nous la remette en tête.

6 heures du mat, le train va partir, direction la Nouvelle Orléans et la Louisiane.

Le point de départ de la musique noire, berceau du Jazz et de Louis Armstrong. On a tous en tête ses maisons coloniales avec ses beaux balcons en fer forgés auxquels sont suspendues ces fougères luxuriantes plus belles que dans un prospectus de Jardiland, se balançant au grès du vent et au son des orchestres de jazz égrainant de-ci de-là leur musique sur des instruments de fortunes. De ce point de vu là, pas de déception, la beauté du vieux carré et l'ambiance festive sont bien au rendez-vous. On flâne dans les rues attirés par le charme mystique des échoppes vaudou, humant les effluves épicées et colorées aux abords des restaurants et admirant les décorations d'Halloween, la ville se préparant à la grand' messe des esprits à la fin du mois. Et puis la nuit fini par tomber et avec elle ce qu'il restait de charme et de typique s'évanouit. Les femmes sont de moins en moins vêtues, la musique de plus en plus bruyante, les néons vous agressent de même que les rabatteurs qui cherchent à vous attirer dans leur club aux cris de trois bières pour le prix d'une. Courage fuyons, cette ville a été nourri après minuit, le gentil mogoï s'est transformé en gremlins.

Un dernier tour par le grandiose cimetière Saint Louis, aux tombeaux hors sols pour éviter le pourrissement des corps dans des terres constamment inondées, lui confèrent des airs de village maudit. On y croise la tombe de Marie Levaud, grand prêtresse vaudou lui laissant un billet pour la réalisation de ses vœux les plus secrets et plus curieux, on y croise la tombe de Nicolas Cage qui non content d'être excentrique avec la forme pyramidale de sa dernière demeure, cumule avec le bon goût, ou le mauvais, vous jugerez, de n'être pas encore mort.

Allez, allez, quittons le tumulte de cette cité pour le pays Cajun, à la conquête des bayous et des plantations.

Quelques heures de route sur des chemins pas franchement bucoliques, jonchés de raffineries de pétrole et de gaz, à travers des bleds aux noms évocateurs tels que Raceland - bien utile dans ces contrées où il faut bien l'avouer, le seul divertissement dominical doit tourner autour des rares troquets où on doit bien se la mettre - et nous atteignons notre cabine dans les bayous rebaptisée rapidement "La cagette".

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On voulait du sauvage, on voulait du typique...

on a pas été déçu. Une petite cabane en bois au confort plus que sommaire, juché sur pilotis au milieu des marais. 30°C et 80% d’humidité, les draps ne sentent pas vraiment le frais. Le fin du fin. C'est parfait, on y est et Betty, notre hôte, un petit bout de femme survitaminée amoureuse de sa région et de son histoire, généreuse jusqu'au bout de ses ongles manucurés et insensible à la voracité des moustiques, est là pour nous guider dans cet univers si loin de ce que nous connaissons.

Retrouvons la fraîcheur de l'air conditionné de la voiture pour nous rendre dans les plantations, ces belles maisons de maîtres, entourées de champ de coton et de cannes à sucres qui au grès des visites guidées vous fait vivre les montagnes russes des sensations, ballottés entre l'horreur de l'esclavage et la magnificence des domaines.

Embarquons enfin pour notre dernière journée en Louisiane à bord d'un petit bateau pour l'exploration du black bayou commenté par le très passionné et passionnant Jimmy Miller amoureux de son pays et de ses habitants. Habitants qui par l'odeur alléchés, ne tardent pas à nous rejoindre venant chercher leur récompense dans une ondulation gracieuse et étonnamment légère, faite d'économie de mouvement jusqu'au moment de sortir de l'eau pour attraper leur KFC suspendu au bout d'une perche. Au milieu des mangroves et autres palétuviers, nous avons la chance d'observer de grands hérons bleus, des aigrettes et des tortues entre autres et de se repaître, tout moteur éteint, de la sérénité de ce lieu grandiose.

Plus que trois jours avant le retour, une dernière halte à Chicago pour boucler la boucle et engranger un maximum de souvenirs de cette ville qui va tant nous manquer.

Que de choses vécues en trois semaines, que de beaux endroits visités, que de belles personnes croisées, de discussions passionnées sur fond d’éthylisme prononcé. Les cubs vont enfin renverser la malédiction en remportant le championnat après 108 ans de défaites, Hilary est en bonne voix pour gagner les élections, nous pouvons partir tranquille.

Et n'oubliez pas, si vous aimez, n'hésitez pas à partager.

Bonne visite.

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